
Par FAL : Le confinement ? Les confinements ? Quels confinements ? Philippe Lombard ne sait pas de quoi vous parlez : il y a des années que, de lui-même, il s’autoconfine, vissé sur sa chaise derrière son ordinateur, pour écrire tous les livres qu’il écrit. Après Ça tourne mal ! – L’Histoire méconnue et tumultueuse du cinéma français, voici, un an plus tard (et après un détour par Reservoir Films, imposant ouvrage consacré aux références cinématographiques de Tarantino), Ça tourne mal à Hollywood ! – L’Histoire méconnue et tumultueuse du cinéma américain.
Un remake, donc ? Pas exactement : si la formule de base reste la même, elle a malgré tout sensiblement évolué. Donc, on aura compris que, là encore, il est question de projets avortés, de films interrompus en plein tournage, d’espoirs brisés, de « creative differences », de caprices de star – il a fallu par exemple offrir une Rolls à Mickey Rourke pour qu’il veuille bien aller à Cannes assurer la promotion de Barfly –, de luttes de pouvoir, de reshoots… Pour être franc, il n’y a pas, à proprement parler, de révélations explosives dans ces cent cinquante pages richement illustrées – tout lecteur un peu cinéphile a déjà entendu parler des frasques de Marilyn, des rapports mutuellement dédaigneux entre Peter Sellers et Blake Edwards au fil des Panthère rose, de la non-carrière américaine de Belmondo et de Dutronc, l’un et l’autre incapables d’aligner correctement trois mots d’anglais, ou encore des fâcheux reflets sur la vitre qui protégeait Sean Connery de la mygale venue le chatouiller dans Dr. No, mais tout cela n’enlève rien au plaisir qu’on peut éprouver à la lecture de cet ouvrage, bien au contraire. Philippe Lombard se contente parfois d’un clin d’œil pour évoquer tel ou tel incident – un paragraphe suffit pour raconter comment, tournant une scène sur le pont Alexandre III, Kirk Douglas commença par cracher sur ce pont, seule et unique manière de saluer la mémoire du tsar pathologiquement antisémite –, mais on trouvera parallèlement de longs développements sur des sujets plus vastes – splendeurs et misères de certains Français, dont Francis Veber, ayant tenté leur chance à Hollywood ; représentations de Paris made in USA (avec force licences poétiques dans le tracé des rues et fautes d’orthographe ahurissantes sur les panneaux de boutiques recréées en studio) ; montage, démontage et remontage de La Vie privée de Sherlock Holmes de Billy Wilder. Bref, si ces récits et anecdotes ne visent pas exactement à démontrer quoi que ce soit, ils n’en montrent pas moins que la formule employée par Alejandro Jodorowsky à propos de ses propres films peut être étendue à bien d’autres films que les siens : « Chaque film est un miracle. »
Philippe Lombard est prié de se mettre à plancher – si ce n’est déjà fait – sur un troisième volume transalpin.Entre les gialli, les péplums et les westerns spaghetti, la matière ne doit pas manquer pour une storia poco conosciuta e tumultuosa del cinema italiano.
Frédéric Albert Lévy

Éditions La Tengo, 22€.
On pourra également lire du Philippe Lombard dans le dernier numéro de la revue Schnock, essentiellement consacré à Lino Ventura
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