Dr. Strange (1978)

FAL : Avant d’être incarnée par Gal Gadot sur le grand écran, Diana Prince, alias Wonder Woman, l’avait été sur le petit par Lynda Carter. Et, de la même manière, avant d’avoir les traits de Benedict Cumberbatch, le Docteur Strange avait eu, dans un téléfilm diffusé aux États-Unis en 1978, ceux de Peter Hooten.

Mais ce Peter Hooten n’eut hélas pas la chance de Lynda Carter (1). Son Dr. Strange, réalisé par Philip DeGuere Jr., avait été conçu comme le « pilote » d’une série, mais, s’il plut beaucoup à Stan Lee, il séduisit si peu les téléspectateurs qu’il n’engendra pas la moindre suite. Quand on le voit aujourd’hui, on se dit que cet échec était aisément explicable. Le scénario tient sur un mouchoir de poche (le résumé de deux lignes fourni par IMDb dit à peu près tout : « A psychiatrist becomes the new Sorcerer Supreme of the Earth in order to battle an evil Sorceress from the past. »). Et les effets spéciaux, qui se résument en gros à des nuages de fumée et à des traits lumineux chaque fois que les héros, bons ou mauvais, déchaînent leurs superpouvoirs, ne sont guère plus élaborés que ceux que Méliès avait pu bricoler dans son hangar trois quarts de siècle plus tôt.

Et pourtant, Elephant Films n’a pas tort d’éditer aujourd’hui un DVD pour ce Dr. Strange. Intérêt purement historique pour cette chose d’un autre âge ? Peut-être. On peut même gager que les teenagers nourris aux blockbusters contemporains auront beaucoup de mal à ne pas ricaner devant une antiquité pareille, même si l’histoire est construite autour d’une passation de (super)pouvoir du côté des gentils (sentant qu’il n’a plus la force de remplir sa mission, le défenseur du Bien, incarné par un John Mills sur le retour, doit convaincre le jeune docteur Strange de prendre la relève).

Pub d’époque de Dr. Strange pour promouvoir le téléfilm dans le mag télé TV GUIDE

Mais la question qui se pose à travers un film comme celui-ci est bien plus générale. La perfection technologique dont jouit le cinéma fantastique depuis trois décennies n’est-elle pas dans une certaine mesure un cadeau empoisonné ? Certes, les Marvel ou les DC comics ne sont pas seulement des « trucs de gosses », mais ils impliquent malgré tout que le spectateur garde son âme d’enfant. Autrement dit, ils requièrent, à tous les niveaux, une certaine naïveté. Le Tintin de Steven Spielberg & Peter Jackson est d’une facture irréprochable, mais – comme le disait jadis Pline le Jeune à propos d’un orateur – son seul défaut est sans doute de n’avoir aucun défaut : il a finalement beaucoup moins de charme que la série télévisée Les Aventures de Tintin, au dessin parfois un peu simpliste, produite au début des années quatre-vingt-dix. En cette période où l’on nous chante sans arrêt les vertus de la sobriété, n’oublions pas qu’au cinéma aussi, dans certains cas, less is more.

Frédéric Albert Lévy 

(1) La série Wonder Woman compta en tout soixante épisodes. Signalons cependant que l’on trouve dans la filmographie de Peter Hooten Une poignée de salopards, autrement dit le film d’Enzo G. Castellari (produit la même année que Dr. Strange) dont s’est inspiré Tarantino pour Inglourious Basterds.

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