Lavi… et rien d’autre

Par FAL : Yul Brynner, Richard Crenna, Leonard Nimoy… Il y a quarante ans sortait aux États-Unis Catlow, un western comique de Sam Wanamaker où les héros étaient essentiellement masculins. Cependant, le bandit souriant interprété par Brynner avait une fougueuse compagne incarnée par Daliah Lavi. Ce fut le dernier rôle de cette comédienne sur le grand écran, à l’issue d’une carrière brève – dix ans à peine –, mais son regard de feu est toujours dans les mémoires.

C’est en 1964 que Kirk Douglas inaugura sa Douglas Foundation, destinée à « aider ceux qui ne peuvent pas s’aider eux-mêmes », mais cette institution ne faisait que prolonger certains gestes qu’il avait pu précédemment accomplir à titre individuel.

Ainsi, quand, onze ans plus tôt, tournant en Israël le film Le Jongleur, il croise sur son chemin une fillette d’une dizaine d’années qui entend devenir danseuse, il décide de l’aider à réaliser son rêve. Le fils d’émigrés russes s’est sans doute reconnu en Daliah Lewinbuk, elle aussi fille d’émigrés ayant fui l’Europe pour échapper à l’antisémitisme. Mise en abyme ? Le Jongleur a précisément pour héros un émigré juif escorté d’un petit garçon.

Daliah Lavi et Lex Barker dans Winnetou

Daliah Lewinbuk va toutefois devoir renoncer à son rêve quand elle découvre que sa tension artérielle élevée est incompatible avec le métier de danseuse. Désormais Daliah Lavi, autrement dit Daliah la Lionne – manière de se prouver à elle-même qu’elle n’a rien perdu de son élan initial ? –, elle décide de devenir actrice. On ne trouve, dans sa filmographie qui ne couvre d’ailleurs qu’une décennie, aucun chef-d’œuvre de l’histoire du cinéma – ironiquement, son film a priori le plus respectable, Lord Jim, réalisé par Richard Brooks, avec Peter O’Toole dans le rôle du héros, est probablement le plus languissant, mais plusieurs titres demeurent, même s’ils ne valent pas tant pour eux-mêmes que pour le reflet qu’ils donnent de l’esprit des années soixante. L’époque – Guerre froide oblige – était aux films d’espionnage : son étonnant don des langues – elle en parlait cinq ou six couramment – et son regard noir, à la fois naïf et décidé, font de Daliah Lavi une espionne idéale, dans des productions sérieuses (Le Retour du docteur Mabuse, Mandat d’arrêt) ou franchement parodiques (Matt Helm, agent très spécial, The Spy With A Cold Nose/Un micro dans le nez, Dieu pardonne, elles jamais !). Les admirateurs de Mario Bava ne manqueront pas d’ajouter qu’elle a donné la réplique à Christopher Lee dans Le Corps et le Fouet. Et les amateurs de westerns américains se souviennent de Catlow, parce que, sans être d’une très grande originalité, ce film au ton léger marquait déjà la fin d’un genre.

Dans Casino Royale (version 1968), Daliah Lavi fait partie – seule femme, sauf erreur, avec Ursula Andress, à jouir de ce privilège – de la troupe des faux 007 destinés à tromper l’ennemi. Mais c’est elle que le vilain Dr Noah, alias Jimmy Bond, neveu de James, entend torturer en priorité : il explique qu’elle a tout simplement le défaut d’être « la plus jolie ». Immobilisée sur une espèce de brancard, au milieu d’un décor outrageusement psychédélique estampillé fin des sixties, Daliah Lavi n’en tient pas moins vaillamment tête à ce bourreau interprété par Woody Allen, qui, lui, s’agite dans tous les sens. Mais, grisée par son désir de vengeance, elle ne se rend pas compte que le cachet contenant 400 mini-bombes atomiques qu’elle fait subrepticement avaler à ce beau (ou plutôt pauvre) diable aura pour effet d’anéantir l’humanité tout entière.

Daliah Lavi et Woody Allen dans Casino Royale de 1967. (Photo de Silver Screen Collection/Getty Images)

Daliah Lavi mit un terme à sa carrière cinématographique au début des années soixante-dix, mais elle connut une seconde carrière – et une gloire nouvelle – en tant que chanteuse, en Allemagne, avant d’aller s’installer aux États-Unis. En France, nous connaissons évidemment mal cette seconde période, mais les photos dont nous disposons semblent indiquer qu’elle ne chercha jamais à donner l’image d’une jeunesse éternelle, ayant compris qu’une dame aux cheveux blancs peut être bien plus séduisante, par la force de ses seuls yeux et de son sourire, qu’une grotesque poupée Barbie au visage figée comme Hollywood en produit tant.

Daliah Lavi est morte en 2017, à l’âge de soixante-quatorze ans.

Frédéric Albert Lévy

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