Souvenir du Temps Jadis

Par FAL : Le texte qui suit est inédit – la revue dans laquelle il devait être publié connut une fin prématurée – et, écrit il y a trente ans, il est peuplé de fantômes dont les noms ne disent probablement plus grand-chose à beaucoup de gens. Qui, à part les rats de cinémathèque, voit encore aujourd’hui les films de Pierre Étaix ? Qui a encore en mémoire Les Raisins verts ou autres émissions de Jean-Christophe Averty (qui pourtant faisaient si souvent scandale) ?

Alors, pourquoi publier ce texte ? Eh bien, parce que, semble-t-il, la vidéocassette, cette vieille chose, serait en train de connaître dans certains pays un revival analogue à celui que connaît le disque vinyle. On nous parle de titres atteignant plusieurs centaines de dollars ! Snobisme peut-être, snobisme sans doute… mais les quelques pages qui suivent ne seront pas totalement inutiles si elles font découvrir à certains la révolution que fut il y a quarante ans la vidéocassette dans l’histoire du cinéma. Les quelques chiffres qu’on pourra lire font rêver quand on sait qu’aujourd’hui un DVD qui se vend à 5000 exemplaires est une excellente affaire…

Enfantimages

« Sur le marché des vidéocassettes pour enfants au début des années 1990 »

À la mémoire de Laredj Karsallah * (1947-2021)

Les années quatre-vingt-dix seront thématiques ou ne seront pas. Mot magique ; l’avenir de la télévision par câble est, nous assure-t-on, aux chaînes thématiques ; tel éditeur vidéo nous explique qu’une cassette d’un film de Fernandel est par elle-même « invendable », mais que tout change dès qu’elle est incluse dans une « Série » ou dans une « Collection Fernandel ». Même l’Éducation nationale, pourtant assez traditionnelle comme on sait, s’y met ; à l’oral du baccalauréat, les candidats ne sont plus interrogés depuis quelques années sur des textes considérés en tant que tels, mais en tant que thèmes ; « groupements de textes » sur le jardin dans la poésie française, sur la situation du poète au XIXe siècle, sur le presse-purée dans les tragédies classiques… Tout, absolument tout est permis dès lors qu’on peut regrouper différents éléments sous une même bannière. Dans dix ans, dans vingt ans, les sociologues auront sans doute le recul nécessaire pour nous expliquer pourquoi les nineties ont été des années « à thèmes ». Peut-être parce que l’invasion des ordinateurs a permis toutes les classifications possibles et imaginables en appuyant seulement sur une touche ? Qui sait ? En tout cas, le fait est là : à la question « Jeu thème ? » il est interdit de répondre « Moi non plus. »

Dans le domaine de la vidéo, il est un secteur béni, celui des films pour enfants. Pour commencer, un exemple, un seul : La Belle et le Clochard. 650000 exemplaires vendus. Aucun film policier, aucun film dramatique, aucun film « sérieux » destiné aux adultes n’a jamais atteint un pareil chiffre. Suivant une expression souvent entendue dans la profession, le marché de l’enfant est porteur. C’est sa première qualité, mais il en a une autre. Quasi morale. « Nous sommes très attachés à notre catalogue enfants, même s’il ne représente qu’un secteur assez faible de notre catalogue général, explique Jean-Charles Goldstuck, directeur de la compagnie Scherzo, parce qu’un produit enfants, contrairement à une série ou à un film X ou même à un film A moins, est un produit noble. » Pour un éditeur vidéo, donc, le rêve : l’Argent associé pour une fois à l’Innocence…

Il y a au moins une part de vrai dans cela. Les instances officielles qui contrôlent la publicité ne permettent pas aux annonceurs de faire tout et n’importe quoi quand ils vantent des cassettes destinées aux enfants. Bien souvent, d’ailleurs, pour éviter tout ennui, les annonceurs s’autocensurent. Il ne s’agit pas d’éviter l’érotisme ou la violence dans les publicités qui visent les enfants, puisque la question ne se pose même pas. En revanche, il faut éviter tout ce qui pourrait passer à tort ou à raison pour une manipulation commerciale sur de jeunes esprits. Ainsi, s’il n’est pas interdit d’utiliser des enfants dans les spots destinés à célébrer les mérites de telle ou telle cassette, on s’abstiendra soigneusement de faire parler ces enfants en voix off sur le plan final représentant le produit proprement dit et indiquant son prix (en jargon de métier, le packshot). Rien, donc, qui pourrait ressembler à un effort pour déclencher un réflexe « pavlovien » chez le jeune public. Cela dit, on avoue sans honte chez les éditeurs que l’enfant est une cible privilégiée du marketing. « On sait que les enfants sont des moteurs puissants dans les achats des familles », déclare-t-on chez Scherzo. Plus conquérant encore, Jean-François Davy repère en l’enfant d’aujourd’hui le gros consommateur de demain, et décrit ainsi l’un des axes de la politique de sa compagnie Fil à Film : « Soucieux d’être à la pointe d’une nouvelle stratégie, Fil à Film propose d’ores et déjà une centaine de titres dont beaucoup sont des films pour enfants, à des prix publics inférieurs à F50,00. Cela représente souvent un produit d’appel pour la grande distribution et une incitation à l’acte d’achat chez le consommateur. Dans la mesure où celui-ci prend ainsi l’habitude d’acheter des films enregistrés, il deviendra ensuite l’acquéreur de produits plus ciblés correspondant à ses goûts et à sa culture. »

Remontons donc la chaîne en commençant par la fin, autrement dit en voyant ce qui se passe dans les magasins de cassettes et dans les vidéoclubs. S’il fallait une preuve de l’importance du marché des cassettes enfants dans ces lieux, il suffirait de regarder où elles sont placées : suivant une politique qui a déjà fait ses preuves pour les bonbons et les caramels dans les supermarchés, les cassettes enfants sont placées juste à côté des caisses. Allez donc faire un tour chez Virgin Megastore, où pourtant l’une des responsables du rayon vidéo vous déclare qu’on-ne-fait-pas-dans-la-comptabilité-la-diffêrence-entre-les-cassettes-enfants-et-les-autres : les cassettes enfants constituent la dernière étape du parcours avant le péage. Dans le plus grand vidéoclub d’une ville importante de la banlieue parisienne, les cassettes enfants sont littéralement sous le comptoir. Bon emplacement, et bon niveau.

Il est difficile d’obtenir des chiffres précis sur la « part de marché » des cassettes enfants. Les éditeurs aiment bien donner des indications relatives : les ventes des cassettes enfants seraient de 40% supérieures à celles de tout autre secteur précis de la vidéo (cassettes de musique, cassettes de sport…), mais cela reste assez vague. Si l’on veut parler de pourcentage net, il semble que, aussi bien dans le marché de la vente que dans celui de la location, les cassettes enfants représentent entre 15 et 20% des activités globales.

Les choses ne se passent toutefois pas de la même manière dans les magasins et dans les vidéoclubs. Si dans les deux cas le client consulte assez peu – « Ils savent presque toujours à l’avance ce qu’ils veulent, et pas question de les orienter vers quoi que ce soit d’autre quand ils ont décidé d’acheter un Disney ! » constate-t-on chez Virgin –, le choix de la cassette est généralement fait par les parents dans les magasins alors que dans les vidéoclubs, sans doute parce que la mise de fonds est moindre, les parents laissent choisir leurs enfants. « Il arrive que les parents veuillent décider pour les enfants, mais les enfants se mettent à pleurer et ce sont finalement eux qui, presque toujours, gagnent, raconte en riant le patron d’un vidéoclub. Il faut dire que les enfants débarquent souvent dans le vidéoclub avec une idée bien arrêtée : en fait, très souvent, ils n’ont pas tant envie de voir un film que de le revoir. Il n’est pas rare qu’une même cassette soit empruntée dix fois par le même enfant. » Le gérant d’un vidéoclub a donc intérêt à acquérir plusieurs exemplaires d’un même titre s’il veut mettre à la disposition de ses jeunes clients des cassettes encore potables deux ou trois ans après leur sortie – opération absolument nécessaire pour les cassettes Disney en particulier, puisque Disney arrête systématiquement d’éditer chaque titre au bout de six mois.

Bref, le phénomène de « repeat audience » qui a fait et qui fait encore les beaux jours du cinéma américain fait aussi les beaux jours des vidéoclubs. C’est lui qui explique que le marché des cassettes enfants à la location reste stable, alors même que les gros éditeurs comme Disney ou Hachette ont considérablement ralenti depuis deux ou trois ans le rythme de leurs sorties.

On pourrait penser que ce phénomène est plutôt nuisible à la vente ; mais Jean-François Davy, déjà cité plus haut, sait en tirer un argument publicitaire supplémentaire : comme les enfants adorent revoir leurs cassettes, parfois jusqu’à cinquante fois, l’achat d’une cassette est « un excellent investissement pour les parents ». Qu’on se le dise… Reste évidemment à définir le contenu de ces cassettes. et même à distinguer des genres à l’intérieur de la grande masse du marché enfants. « Nous hésitons sur les titres japonais, explique-t-on dédaigneusement chez Virgin Megastore. Il y a des choses qui ne sont pas chères, mais nous voulons la qualité – Disney, Bugs Bunny, Tex Avery. Certains produits n’entreront pas chez nous : nous les laissons aux hypermarchés. » Seulement, chez Scherzo, qui distribue ses cassettes dans les hypermarchés, cassettes de dessins animés souvent japonais puisqu’elles reprennent des séries diffusées à la télévision (She-Ra, Black Star, Les Maîtres de l’Univers), on insiste sur le fait qu’on visionne soigneusement tous les produits enfants avant de décider de les inclure au catalogue : « On ne vend pas n’importe quoi. »

Cela nous amène en fait à remonter aux éditeurs de cassettes enfants et à voir comment ils organisent leurs affaires. On pourra les classer grosso modo en trois catégories. Il y a d’abord Film Office, qui constitue une catégorie à lui tout seul pour la simple et unique raison qu’il est l’éditeur exclusif des Disney, celui donc qui donne de l’urticaire à tous les concurrents. Il y a les éditeurs indépendants « généralistes », tels que Fil à Film, qui incluent dans leur catalogue une importante section enfants. Il y a enfin, mais ils sont rares, les indépendants qui, sans prétendre une seconde rivaliser avec le monstre Disney, centrent l’essentiel, sinon la totalité de leur production sur les cassettes enfants. Écho est sans doute le meilleur représentant de cette dernière espèce. Sérénité et (auto?)satisfaction chez Disney : « Les gens qui achètent Rocky ne se préoccupent pas de savoir s’ils achètent une cassette Warner Home Video, explique André Touati, directeur du marketing. Mais ceux qui achètent une cassette Disney achètent d’abord Disney avant d’acheter un titre de film précis. C’est cette synergie qui fait la forte de nos produits. »

Newsletter Warner réalisée en partenariat avec l’équipe de Starfix et disponible dans tous les vidéo-clubs de l’époque.

Cette synergie se double d’une synergie « des générations » : « Quand les enfants réclament des cassettes qui reprennent des dessins animés qu’ils ont vus à la télévision, les parents ne savent pas forcément de quoi ils parlent. En revanche, Disney, ils connaissent, puisque Disney existe depuis soixante ans. Ce sont autant les parents que les enfants qui achètent du Disney. » Est-il drôle de travailler dans une compagnie qui semble condamnée à être toujours la première ? « On est sûr de gagner, répond André Touati, mais on a d’autres challenges. Par exemple, prévoir un tirage de 250000 cassettes pour La Belle et le Clochard et en vendre 650000. Battre aussi des records en atteignant, sans publicité à la télévision, 275000 pour Roger Rabbit. Et il s’agit chez nous de ventes fermes. Certains confrères ont fait des scores intéressants, mais on aurait des surprises si l’on s’intéressait de plus près à leurs retours. » Parmi les « confrères » dont on espère qu’ils ont eu beaucoup de retours, Proserpine. Proserpine a eu l’impudence de sortir sa version en cassette de La Petite Sirène, têtes de gondoles à l’appui dans les hypermarchés, le jour même où Disney sortait sur le grand écran La Petite Sirène Disney. Le traumatisme a été si brutal qu’à l’heure actuelle on n’a pas encore décidé chez Film Office de la date de sortie en cassette de La Petite Sirène Disney. On attendra le temps qu’il faudra pour qu’il n’y ait plus la moindre confusion possible.

Car une cassette Disney doit être un succès. Le plus « mauvais » titre de la maison, un Winnie l’Ourson, a quand même dépassé 20000 exemplaires. Un film traditionnellement peu apprécié des Français, Alice aux pays des merveilles, a dépassé les 140000 cassettes. Et les responsables de Film Office n’ont pas l’intention de s’arrêter en si bon chemin : « Quand La Belle au bois dormant faisait en France 190000 cassettes, Bambi atteignait à la même époque aux États-Unis le chiffre de dix millions et demi d’exemplaires. Certes, la population des États-Unis est cinq fois plus importante que celle de la France, mais quand même… » En effet, en faisant une règle de trois, on arrive à la conclusion que les cassettes Disney se vendent aux États-Unis dix fois plus qu’en France. L’ambition chez Film Office est donc, compte tenu du développement rapide du parc des magnétoscopes dans notre beau pays. d’atteindre d’ici quatre-cinq ans le chiffre de deux millions de cassettes pour les classiques Disney. Et il va falloir compter à partir de septembre prochain avec un nouveau paramètre : Disney va sortir en France ses premiers LaserDiscs.

Chez les indépendants, on se défend comme on peut. Jean-François Davy veille à maintenir en permanence dans son catalogue 250 titres destinés aux enfants, et peut se flatter d’avoir le monopole de plusieurs héros déjà solidement ancrés dans la mythologie enfantine : Tintin, Lucky Luke, L’Ours de Jean-Jacques Annaud. Chez Scherzo, on s’insurge contre une définition réductrice des enfants et du marché enfants. On rappelle que la jeunesse de la maison est d’abord un état d’esprit et, même si chaque produit a sa cible, on considère qu’il y a dans le catalogue général plusieurs titres idéaux pour la distraction ou l’éducation des jeunes esprits. Par exemple ce documentaire qui vient de sortir sur l’art du maquillage, ou cet autre documentaire de la NASA sur la conquête de la lune, ou la série des Making of qui révèle aux publics de tous âges comment le robot de RoboCop peut naître sur un écran de cinéma.

Le cas le plus passionnant dans l’édition des cassettes pour enfants est sans doute celui d’Écho. Le nom d’Écho n’est pas toujours très visible, la compagnie préférant faire ressortir sur les jaquettes les noms de ses collections plutôt que son propre nom, mais elle a sorti au cours de la seule année dernière quelque chose comme 250 titres, titres pour enfants dans leur immense majorité. C’est beaucoup, c’est même trop, reconnaît-on dans la compagnie elle-même. Les attachés-presse ont parfois du mal à défendre de front dix ou vingt titres en même temps et l’on va un peu « se calmer ». Mais l’exploration du marché enfants se fait avec une rigueur exemplaire. D’abord, il y a chez Écho un énorme effort pour diviser ce marché en différentes sections. Et si l’on est très fier de l’arbre Babar, on tient à ce qu’il ne cache pas la forêt. La forêt, c’est aussi par exemple Histoires pour s’endormir, cassette d’une cinquantaine de minutes regroupant une dizaine de films courts destinés, comme leur titre l’indique, à favoriser l’endormissement des très jeunes enfants, pour ne pas dire des bébés. C’est également des séries qui, par l’esthétique même de leurs jaquettes, renvoient les enfants à des livres : on trouvera par exemple dans « Les Grands classiques » une version en dessin animé de Robinson Crusoé ; on pourra piocher aussi dans la série des Contes & Légendes ou dans la « Collection bleue » qui réunit, elle, des films inspirés d’œuvres littéraires célèbres (contes de Grimm, d’Andersen …) et tournés avec des acteurs en chair et en os. Bref, Écho ne craint pas d’avoir des vertus pédagogiques : l’une de ses collections, Wapiti, réalisée avec le concours de la revue du même nom, réunit des documentaires sur les animaux du monde entier. Pédagogie de la science et pédagogie de la morale : les jaquettes des Babar indiquent les leçons à tirer de chaque histoire (par exemple, celle des Premiers pas de Babar est : « le sens de la responsabilité et le respect des autres »).

Écho a le mérite d’indiquer constamment aux enfants que la cassette qu’ils ont sous le nez peut déboucher sur autre chose. On a beaucoup « synergisé » avec les Albums Babar quand on a sorti les cassettes, mais certains diront que ce n’était qu’un coup de marketing. Comment, en tout cas, ne pas saluer l’intelligence de la collection « Vanille-Fraise », qui livre sous blister une cassette, un album à colorier et une boîte de six crayons de couleur ? L’album est bien entendu en rapport avec le dessin animé de la cassette. L’enfant, en redessinant, ou tout au moins en retrouvant dans les coloriages les personnages qu’il a vus, devient actif. Mieux encore : il a envie à un moment donné de ne plus voir sa cassette. Il se met à exister par lui-même.

Question grave que celle des rapports entre l’enfant et l’image. Et difficile. Pierre Étaix, qui a sans doute réalisé certains des plus beaux films « familiaux » du cinéma français (v. son Soupirant, qui ressort en ce moment), s’interroge : « Les enfants naissent maintenant pratiquement avec une télévision devant leur berceau. Dans les chambres des nouveau-nés, comme dans celles des mourants d’ailleurs dans les hôpitaux, il y a la télévision. Les enfants n’ont plus le même rapport avec l’image et le son que celui qu’ils avaient quand seul le cinéma existait. Comment un enfant a-t-il perçu les choses en voyant la guerre du Golfe à la télévision ? » Et l’expression « film pour enfants » laisse Étaix perplexe : « Je ne sais pas, moi, ce qui attire spécifiquement les enfants. Le cirque m’a fasciné lorsque j’étais enfant, mais l’opéra, la peinture m’ont fasciné aussi. Je pouvais m’identifier à des héros adultes. Faust me passionnait. Et les tableaux qui me plaisaient n’avaient bien évidemment pas été composés “ pour des enfants ”. C’est uniquement dans le spectacle qu’on fait cette ségrégation entre enfants et adultes. Peut-être l’attention des enfants n’est-elle pas la même que celle des adultes. Cela se sent au cirque, par exemple. Il faut faire des programmes plus courts. Mais sans changer pour autant les choses d’un iota : les enfants voient souvent bien mieux les choses que les adultes. »

Jean-Christophe Averty, qu’on surnomma naguère l’Enfant terrible, estime, lui, que les enfants ne sont vraiment « pas gâtés » du point de vue des images. Il s’est amusé une fois à compter avec un mini-ordinateur le nombre de coups de feu qui éclataient un soir sur un écran de télévision. Expérience déprimante. Où sont les « Enfantines » par lesquelles il a commencé sa carrière… ? Il pense que c’est avec des films sur la science, sur les arts, sur la musique qu’il faut distraire les enfants. Au théâtre, il met actuellement en scène aux Bouffes du Nord On purge bébé de Feydeau. Mais, lorsqu’il entend des publicitaires dire qu’il faut cibler le public jeune, il a envie de vomir sur cet univers où les mots laissent à penser qu’on ne purge pas, mais qu’on tue les enfants.

Frédéric Albert Lévy  

P.S. – Apprendre à voir : la vidéo à l’école

Très appréciée par les baby-sitters parce qu’elle a le pouvoir de transformer en statues de sel les enfants dont elles ont la charge, la télévision a été très longtemps – et exactement pour les mêmes raisons – considérée avec beaucoup de circonspection par les enseignants et les éducateurs. Leur attitude a cependant considérablement évolué lorsqu’est apparu le magnétoscope, dans la mesure où celui-ci leur donnait les moyens de contrôler l’image. Aujourd’hui donc, toute école maternelle qui se respecte a sa salle de projection vidéo, et il n’est pas rare de trouver dans certains lycées ou collèges parisiens jusqu’à quatre ou cinq magnétoscopes. Pour les petits, les films projetés par les instituteurs sont essentiellement de deux types : dessins animés et films documentaires illustrant en particulier tout ce qui pourrait s’appeler « leçons de choses » (vie des animaux, des oiseaux exotiques, images de la conquête de l’espace, etc.). Plus importante ou aussi importante que la projection elle-même est 1a discussion qui la suit (ou qui la prépare). Car tous les psychologues sont bien d’accord sur ce point, les images en soi ne sont qu’un déclencheur. Ce qui compte, c’est ce que les enfants en font. Et les angoisses ne naissent pas forcément de visions particulièrement violentes. Il est vivement recommandé aux parents de regarder la télévision avec leurs enfants, même lorsqu’il s’agit de dessins animés, parce qu’il convient souvent de dissiper des malentendus. Les enfants ne comprennent pas toujours ce qu’ils voient, confondent les menaces « métaphoriques » d’un personnage avec des déclarations objectives et traînent dans leur mémoire des situations non résolues. Éviter tout particulièrement de laisser l’enfant regarder seul un épisode isolé d’un feuilleton : s’il ne voit pas l’épisode suivant, comment saura-t-il que la petite héroïne perdue dans la forêt va finalement retrouver sa mère ? En revanche, s’il discute de la chose avec ses parents, même s’il ne voit pas l’épisode suivant, il pourra apprendre à anticiper, ce qui constitue l’une des opérations les plus essentielles dans sa formation psychique. Bien entendu, toutes les projections vidéo faites dans les écoles sont parfaitement illégales, puisqu’elles s’apparentent franchement à des projections publiques, mais il est peu probable que les enseignants coupables se retrouvent devant les tribunaux : certains éditeurs vidéo appellent directement les écoles maternelles pour leur signaler la sortie de tel ou tel de leurs « produits ».

Remerciements : Nicolas Rioult et Doug Headline.

* Laredj Karsallah fut un temps l’éditeur de Starfix

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